Bavardage #13
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Godzilla versus
Mighty Morphin Power Rangers
Paprika
Rédactrice Comics, LDVELH et Synthwave
Publié le 25 Septembre 2023
Format — VO
Editeur — IDW publishing
Scénario — Cullen Bunn
Dessin — Freddie E. Williams II
Couleur — Andrew Dalhouse
Lettrage — Johanna Nattalie
Genre — Licence / Kaiju / Action
Particularités — TPB — 144 Pages — $17.99
Couverture — Freddie E. Williams II
It's Morphin Time !
"Lorsque la méchante sorcière Rita Repulsa retrouve le Focus Multiversel —un joyau à travers lequel on peut observer toutes les réalités— Elle décide de cibler une terre où les Power Rangers n'existent pas, pour qu'ils ne puissent interferer avec ses plans machiavéliques. Mais ce qu'elle découvre à la place c'est une race de conquérants extra-terrestres connus sous le nom de Xiliens. Ils envoient des monstres dans l'espoir de détruire Godzilla et de conquérir la planète. Alors que Rita et les Xiliens s'associent, leurs plans sont perturbés par l'arrivée des Power Rangers ! Ces derniers et Godzilla pourront-ils stopper cette alliance avant que ce ne soit trop tard ?"
Eh non camarade, tu ne rêve pas ! Les gens chez IDW ont (encore) pris de la drogue et se sont lancés dans un autre crossover improbable avec les petits fifous de chez Boom, les premiers ayant les droits pour Godzilla, les seconds pour Power Rangers. C'est Cullen Bunn qui se charge de cette rencontre entre un daikaiku japonais et du tokusatsu à l'américaine. Freddie E. Williams II est aux dessins, Andrew Dalhouse à la colo' et Johanna Nattalie au lettrage ! Aficionados de grosse bagarre et d'équipe de super-héros japonais adaptée à l'américaine, vous allez être servis ! Sortez vos Morphers et sautez à travers les dimensions avec moi !
SKREEEEOOOONK
Le scénario ne s'embarrasse pas vraiment de détails et se jette directement dans la bataille. Le Ranger Vert (Tommy Oliver) a poursuivi Rita et ses sbires afin de l'arrêter mais lorsqu'il reprends conscience, il tombe nez à nez avec Godzilla. Peu impressionné par "un iguane géant" (ça sonne comme un tacle au Godzilla de Roland Emmerich en 1998) il souffle avec son masque sans ouverture dans son épée comme un ocarina, faisant ainsi un bruit de trompette pour appeller son DragonZord ! Il est évident que son adversaire ne va pas du tout apprécier et bien vite ça tourne à la baston, Godzilla mettant aisément Tommy hors-jeu. Mais le reste de l'équipe, Jason, Kimberly, Billy, Trini et Zack, débarque. Pendant que le MegaZord des Power Rangers lutte à son tour, Tommy est enlevé par Rita et privé de son Moprher...
Cullen Bunn (Uncanny X-Men, Venom, The Sixth Gun, Harrow County) est clair avec les lecteurs, on est là pour passer un moment de fun nanardesque, assorti aux effets spéciaux dessins de Freddie E. Williams II (Batman/Teenage Mutant Ninja Turtles, Seven, Soldiers: Mister Miracle) pour en mettre plein la vue. Sans prendre de risque ou faire quoi que ce soit d'extrêmement créatif, Bunn et Williams nous lancent dans un monde alternatif avec pour seule excuse des gros robots contre des gros monstres. SI vous vous attendiez à un lore détaillé sur l'une des licences, c'est raté. Ce n'est pas dans le canon Godzilla ni dans celui de Power Rangers et le récit se contente des bases les plus basiques pour les deux licences donc si vous n'avez rien lu d'autre, vous ne serez pas perdus !
Hahaha ! que la liberté est douce après 10 000 ans de scénarios chez Marvel !
Dans l'ensemble j'ai passé un bon moment de lecture mais c'est loin d'être parfait. Que les lecteurs sérieux passent leur chemin c'est vraiment digne d'un épisode de Power Rangers, si demain on me disait que ça allait être adapté dans le format "épisode de 20 minutes" ce serait crédible. Le récit est vraiment minimaliste et ne sert que de pretexte pour Bunn de déballer des MegaZord et des Daikaijus pour qu'ils se mettent sur la gueule. Pas de message engagé ou de thème philosophique, vous avez payé pour de la baston, vous en avez. Le récit était bouclé en cinq numéros mais a laissé une fin ouverte, appellant à une suite libre d'ignorer les évènements de ce premier tome.
Mon premier embêtement viens du choix du dessinateur. Freddie E. Williams II dessine très bien, son Godzilla est très réussi mais ses rangers sont plus musclés que des drogués de la salle de muscu et je suis très perturbée. J'ai l'image d'une bande d'ado avec un gabarit rocambolesque et ici on a un défilé de Monsieurs Muscles aux cuisses limite hypertrophiées. C'est pas excessivement gênant en soi, mais pour moi qui suis habituée à Tokusatsu télévisé, ça me travaille une telle musculature chez des ados. Rita est très jeune, c'est dommage de ne pas lui avoir donné l'iconique physique de Machiko Soga. Le costume en revanche est identique à celui de l'actrice ! Au final, si les physiques des humains sont moyens, c'est rattrapé grâce à son travail sur les monstres qui est très réussi. Godzilla ressemble à sa mouture du film "Godzilla Vs King Gidorah" (1991). Le fait qu'il y ait des monstres de Power Rangers et de Godzilla est intéressant, je pense que ça aurait fait un joyeux bordel en format télévisé.
ZRRRRAARAARK
Le scénario ne prends pas de risques et ne teste rien, c'est juste rédigé pour que ça bastonne de partout tout en faisant un peu vibrer la corde nostalgique des gens ayant grandi avec Mighty Morphin Power Rangers. Je trouve ça un peu dommage car au vu du crossover et des possibilités que ça ouvrait c'était finalement quelque chose de très convenu. Avec tout ce qu'il était possible de faire en terme de retournement de situation et de trame de fond, qu'on se retrouve avec ça me déçoit assez. Sans être une mauvaise lecture, je m'attendais à mieux de la part de Cullen Bunn. Le dessin relève le niveau et donne quelque chose de lisible, même si pas très enrichissant. Pour ma part je classerais ça comme un comic-book "Pop-Corn", la lecture typique ou vous débranchez le cerveau et ou vos neurones peuvent faire du ping pong sans que ça influe sur votre compréhension de lecture.
Je salue le travail d'Andrew Dalhouse à la colorisation car même si les dessins de Williams II sont superbes en noir et blanc, le travail effectué par Dalhouse est excellent et c'est le truc qui ne me fait pas regretter l'album. On aurait tendance à croire que des scènes d'action avec des persos en couleurs primaires et des monstres multicolores rendraient le tout assez confus mais il s'en tire à merveille et parvient à ajouter un grande degré de lisibilité à l'ensemble. Du coup je suis curieuse de voir ce qu'il a pu faire d'autre en colorisation. Le lettrage est propre, les cris des monstres ne font pas tache dans les cases, ça n'alourdit pas la structure visuelle des pages. Le fait de mettre les onomatopées en avant-plan ou en arrière-plan pour accompagner un mouvement ou une créature est vraiment bien fichu, les polices d'écritures sont propres, c'est vraiment top. D'ailleurs si je dois trouver une vraie grosse qualité au dessinateur c'est dans sa narration visuelle. Le choix de cases aux contours sketchy, parfois rondes, en biais ou carrément en zig-zag, ça donne vraiment une excellente fluidité et une netteté au parcours visuel. Bravo l'artiste.
Synthèse Téléologique
C'est une lecture sympathique mais qui tombe un peu à plat en terme d'inventivité, je m'attendais à quelque chose d'un peu plus foufou ou couillu venant de la part de Cullen Bunn qui n'a plus à faire ses preuves en termes d'écriture. Si Freddie E. Williams II dessine des ados hypertrophiés à faire pâlir le gagnant du concours Mister Univers, ses monstres sont très réussis. Il arrive très bien à figurer l'espace et le mouvement dans ses cases, le tout dans une lisibilité originale et énergique. (Les deux ne vont pas forcément de pair chez certains artistes malheureusement) Le fait que ce soit à mi-chemin entre un épisode de Power Rangers et d'un Nanard du dimanche soir m'aide un peu à avaler la pilule. J'avais des attentes mais je ne suis pas non plus déçue, au final je dirais que c'est juste "bien". C'est pas "nul", "mauvais" ni "super bien" c'est vraiment, purement juste " bien". Si vraiment je devais quantifier ça par une note, ce serait un 6/10. C'est une lecture décente mais c'est pas encore la dinguerie que ça pourrait être.